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Randa Chebbah : “Le poids des responsabilités publiques ne doit pas reposer sur les épaules de la société civile”

Dans une prise de position lucide et ferme, la militante
de la société civile Randa Chebbah dénonce ce qu’elle considère comme une dérive institutionnelle : la tendance croissante de l’État à déléguer, voire abandonner, ses fonctions essentielles aux associations et initiatives citoyennes. « Ces dernières années, on assiste à une inversion inquiétante des rôles : là où l’État devait être le garant des droits fondamentaux, il devient spectateur, comptant sur les ONG pour combler les brèches », déclare Chebbah.
Elle évoque l’exemple poignant de l’effondrement d’un mur dans une école publique, tragédie ayant coûté la vie à de jeunes élèves. « Dans la foulée du drame, certains responsables ont pointé du doigt l’inaction des associations locales. Mais la maintenance des infrastructures scolaires, leur sécurité, leur conformité aux normes, relèvent exclusivement de l’État, qui perçoit les impôts et détient les outils d’inspection et de planification. »
Selon elle, ce n’est pas un cas isolé : l’accès à l’eau potable dans certaines zones rurales, la prise en charge des sans-abri en hiver, ou encore la gestion des déchets dans plusieurs quartiers sont autant d’exemples où les associations se retrouvent à pallier les carences d’un service public défaillant. « Le problème, ce n’est pas le dynamisme des acteurs associatifs — bien au contraire, il est admirable. Le vrai danger, c’est quand cet engagement devient la norme au lieu d’être l’exception », explique Chebbah.
Le vrai danger, c’est quand cet engagement devient la norme au lieu d’être l’exception
Elle met en garde contre une “privatisation silencieuse du service public par la voie associative”, qui détourne l’attention de l’État de ses propres obligations. Elle poursuit : « Quand une école s’écroule, ce n’est pas l’association locale qu’il faut blâmer, mais les décideurs politiques, les ministères, les ingénieurs de l’État, les budgets mal répartis. Ce glissement de la responsabilité est non seulement injuste, mais dangereux à long terme : il alimente la défiance envers les institutions et précarise encore plus les populations vulnérables. »
La société civile est là pour impulser, innover, alerter. Pas pour réparer les erreurs systémiques d’un État absent
Pour conclure, Chebbah appelle à une recentralisation de la responsabilité publique, mais aussi à une redéfinition des rôles : « La société civile est là pour impulser, innover, alerter. Pas pour réparer les erreurs systémiques d’un État absent. Il est temps de remettre les responsabilités à leur juste place. »